Pied de Biche
Soutien à la production / création / diffusion/ musicale
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LP
En 2017 , un groupe lyonnais qui avait décidé sans aucune raison valable de porter le nom d’une ville où il n’avait jamais mis les pieds sortait son premier album, « Ceiling coast ». Invraisemblable cavalcade, drache de riffs incandescents, véritable lâcher de harpies qui, après s’être délectées des larges estafilades tracées sur nos âmes pantelantes, nous laissait épuisés, confus, mais conquis, comme après une nuit de Walpurgis. Après une salve de concerts encore fumante dans les mémoires, les trois musicien.nes, qui se rêvaient en stakhanovistes de l’undergound enchaînant les sorties de disque, furent rattrapés par de basses contingences de la vie telles que la nécessité de vendre sa force de travail contre un salaire, ce qui constitue rarement une expérience enrichissante. Se réunissant alors quand cela était possible, pour improviser fiévreusement et sublimer chaque chiennerie de la vie sous la forme d’un nouvel accord interdit, d’un autre personnage incarné au chant ou d’une ultime sournoiserie rythmique, la matière pour remplir un vinyle recto/verso prit forme. Mais cette fois lentement, soumise à un processus de raffinage inédit pour le groupe qui jusque-là nous jetait les morceaux à la gueule aussitôt composés, comme s’ils leur brûlaient les doigts. En symbiose avec cette exigence, la production de l’album, encore une fois signée Yann Van Eijk, se fait moins bileuse que sur le premier disque et offre une ampleur confortable aux compositions qui dès lors exhibent pleinement l’éclat de chacune de leurs facettes. De la grâce arrogante de Siouxsie & The Banshees à la science du feulement mélodique de Blonde Redhead, en passant par les entrelacs abrasifs de Live Skull, le tout pris entre les pièces d’artillerie d’un jazz déviant sous amphets, d’une impromptue coulée pyroclastique black metal et des nouvelles du front ukrainien jouées à la batterie, le groupe nous propulse avec ses contrastes narratifs d’un langoureux travelling dans une grotte de glace à l’ascension du Mordor chaussés d’une paire de Crocs. En 2023, on accueille « Tricky floors » à la façon des personnages sur la pochette : tournant le dos à un monde irrémédiablement souillé, trouvant l’émerveillement dans la dissolution salutaire de l’ego face à une œuvre qui rayonne comme un soleil malade et transcende la somme de ses parties.